• Je marche sous la pluie, j'ai prit ma guitare, il fait nuit, il est tard ...

    Je suis poussé par mes tripes, comme prit par un réflex de survie, et si j'étais en train de mourir, qu'est ce que je ferais maintenant ? J'ai écrit dans mon carnet un message d'adieu, au cas où. Mon ventre me fait mal et je songe. Pourquoi suis-je ici ? Je souris, j'aime l'idée que je ne contrôle rien et que je laisse mon inconscient m'emmener sur la plage. J'avais besoins d'un bol d'air frais, d'une bonne douche céleste et de jouer de concert avec les vagues. Je note dans ma tête : "Quand un nomade est coincé, il joue de l'espace et du temps, pour que sa prison lui paraisse différente chaque jour." C'était mieux dans ma tête. Je sens la petite pluie fine qui mouille doucement mes cheveux, je sens une goutte tomber, juste sous mon oeil et rouler comme une larme. Elle est chaude. Il n'y a personne, j'ai l'impression que la ville est morte, mais  les quelques voitures qui m'ignorent me disent que non. J'ai tout l'air d'un vagabond avec mon atirail, et je me demande pourquoi personne ne s'arrête pour me proposer son aide. Je pense à la mort. Je serais triste de mourir maintenant, je n'ai rien acomplie de tout mes rêves, j'ai à peine commencé à refaire confiance, à partager, à être moi, à voyager, à un être un frère pour ceux que j'aime. Mais j'avance en me faisant à l'idée que demain, je ne serais peut être plus là. J'arrive à la plage, personne, bien entendu. Je m'abrite sous le balcon d'un poste de sauvetage, d'où tombe l'eau du toit, dessinant devant moi des sortes d'éphémères cratères aquatiques.
    J'allume une cigarette, je trouve ça poétique, fumer doucement et voir le brasier rougir, inspirer profondément, et expirer un filet de volute au rythme des vagues qui se brisent sur le sable. J'écoute, je m'appuie contre le mur, je ferme les yeux, il manque ma fratrie, et une belle inconnue à qui faire la conversation. Je sort ma guitare, je joue pour la mer, je ne demande pas d'applaudissement, je ressent la musique, je chante, je joue fort, je joue doucement, je pousse ma voix ou je murmure. Puis je redemande le silence. Je ne suis pas mort. Je me rend compte du problème de vivre comme si on allait mourir, la chute est nulle, la fin n'arrive pas au bon moment. Je note dans ma tête "Je veux vivre comme si je voulais vivre demain". Je compte les syllabes, c'est nul. "Vivre comme si je voulais vivre demain". Alexandrin, c'est mieux. Alors je suis là dans mon silence et mon inconscient me rappel à l'ordre :

    "Mauviette, t'oserais même pas aller à l'Ile au jeux, t'aurais peur d'une barrière.
    - Mais c'est marqué que c'est protégé par un gaz, et qu'on y va à ses risques et périls !
    - Ben oui, naturellement, l'alarme déclencherait au minimum du gaz moutarde ...
    - Je peux pas sauter la grille, j'ai ma guitare.
    - Si c'est ça qui te retient ... pauvre type."

    Je me lève, je m'invente des excuses pour ne pas aller dans le complexe saisonnier désert qui me faisait de l’œil chaque fois que je passais devant. Vivre comme si je voulais vivre demain. La nuit berce ma mélancolie jusqu'à ce que j'arrive à ce fameux endroit. Je pouce la porte du grillage, c'est ouvert. Je regarde derrière moi, personne ne peut me voir. J'avance doucement en regardant du mieux que je peux où je marche, on sait jamais, leur protection au gaz, j'ai peur. Chaque pas est une montée d'adrénaline. J'arrive devant ce qui m'a semblé être une sorte de chantier et je me dis que je vais marquer mon territoire. J'entends un bzz, comme une caméra rotative, je remonte mon fute et je regagne la sortie. Je me trouve bizarre  d'avoir peur d'un rien, d'avoir toujours fait le raisonnable quand il s'agit de faire des conneries pour s'amuser. Mais je me sens fier d'avoir vaincu une part de cette peur, de cette angoisse de vivre. Avoir des ennuis, être gazé et poursuivit par un vigile, c'est marrant pourtant. Demain je retourne là bas, et je pisse dans la piscine.

    P.S : C'était désaffecté, les piscines étaient remplies de terre pour faire des terrains de karting. Déçu, je me suis dit qu'il fallait que je sauve cet endroit. J'ai escaladé le bâtiment principal, je me suis allongé sur le toit, et j'ai admiré la pleine lune. Plus loin je voyais l'imposant château d'eau, et je me suis vu dessus ... Mais ça sera pour la prochaine fois.

    Je marche sous la pluie, j'ai prit ma guitare, il fait nuit, il est tard ...


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  • Une belle éternité


    Sur l'infini du temps et de l'espace qui régit l'univers, il existe une chance que vous lisiez cette phrase. Ceci implique nécessairement que sur une infinité de temps, cette chance existe à nouveau, et ce, une infinité de fois. Aussi, il serait important d'ajouter au dicton "Nous n'avons qu'une seule vie", que nous n'avons qu'une seule vie à l'infini. Offrez vous donc une belle éternité ...


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  • Au Destin

    Nous dérivons doucement, à trois, sur de forts rondins, sur un radeau rudimentaire, tranquille et heureux. Assis ou allongés, ramant à l'aide d'écorces, poussant d'un bâton ou laissant faire le courant, nous goutons à l'instant. Les nuages succèdent au soleil, le soleil aux nuages, comme nos rires simples et notre émerveillement silencieux. Le bruit des petits tourbillons d'eau de nos efforts, les cris diffus des animaux provenant des roseaux et le bruissement de ceux ci, sont autant d'apaisement pour l'âme. J'inspire comme pour que tout s'insinue profondément dans mon être.
    Nous sommes fiers de troubler les eaux stagnantes et de remuer la vase immobile du lieu, car nous savons que c'est exceptionnel, nous aimerions même qu'on soit vu au milieu de ses eaux qui ne sont guère fréquentés que par de mornes pêcheurs.

    Alors que nous décidions d'aller plus loin, juste pour voir ce qu'on ne voit pas, une poule d'eau réveil nos instincts de chasse, mais bien lui fasse, elle s'enfuit plus vite que ne file notre grossière embarcation, et disparait.
    Je demande d'être porté sur le rivage pour que nous soyons munis de pierre au cas où une autre de ses rencontres devaient se reproduire. L'atmosphère se raidit un peu du fait de la fracture que cause mon départ et ma décision, mais bien vite le charme nous absorbe pour ne rien laisser de cet interlude dans nos têtes.

    Il faut qu'à nouveau la Nature nous appelle, c'est au tour d'un canard de fuir mine de rien à notre approche. Hania se précipite dans l'eau puis se dépêche de toucher terre, ou l'animal s'est déjà porté hors de sa vue.
    Pourtant il avance, il revient et nous demande de nous dépêcher de lui donner des pierres : il y a des corbeaux sur le chemin.
    Entre les feuillages qui ornent la berge, je le vois avancer à quatre pattes, il ne fait aucun bruit. Après qu'il a parcourut une bonne distance, je me joins à sa chasse.

    Je me fais le plus furtif possible, je me concentre sur mon chemin et sur le corbeau qui n'a pas fuit. Le moment est en suspend, je n'entend que mon souffle et les branches d'arbres qui vacillent. Devant, Hania me fait des signes, il est tout proche, je vais attirer l'attention et couper son éventuelle retraite, tout est clair comme si nous l'avions déjà fait.
    Nous nous rapprochons chacun par un flan, et l'oiseau, qui nous regardait tour à tour, saute soudain dans les ronces. J'avance, et je me rend compte qu'il est si proche que je peux le saisir. Je me sens désemparé, mais Hania arrive par derrière et l'attrape sans heurts.

    Il hésite déjà à le relâcher quand nous le montrons à Soja, alors je cours de toutes mes forces cherche un couteau, pieds nus sur la terre sèche et balafrés qui parfois me réserve quelques douleurs. J'arrive haletant, et dois me calmer pour ne pas effrayer l'oiseau qu'Hania, en tailleur, abreuve de paroles rassurantes.

    Je le caresse à mon tour, je m'excuse, et je le remercie pour sa vie, je marque une pause, dans ma tête je continue à le gratifier de mon respect. Puis je demande qu'il soit posé sur le ventre, j'ai la lame en main, on se regarde, je touche sa tête, et je lui dit "A toute".

    Hania s'écroule en pleurant, et le sang vient arroser le sol.

    Nous posons nos mains sur les épaules, et finalement je le prend dans ma bras en lui disant qu'il a été fort : c'est lui qui à été l'ultime témoins de chacun des derniers battements de cœur du Corbeau du Destin.

    Nous enterrons sa tête sous un arbre, j'y grave au couteau "Merci", et je me prosterne sur sa tombe en promettant que mon chemin sera à jamais de faire partie de l'Harmonie naturelle, sur le chemin de la Liberté, je remercie encore une fois le corbeau d'avoir été sur mon chemin, je remercie ma vie et l'Ensemble du Tout et du Un. J'enlace Soja à son tour, qui a été aussi courageux que nous, car il ne nous à pas paniqué.

    Au retour tout le monde se tait. Je me sens Moi au milieu des feuillages, en sécurité parmi les arbres, j'ai l'impression de faire partie de tout et d'être se tout, je suis bien dans un milieu que j'aime. J'espère qu'il va pleuvoir.

    Hania décide d'aller voir Tekoomse, alors nous marchons encore, et les langues se délient devant le couché de soleil qui donne de magnifiques couleurs au nuages noirs qui passent au loin. Chacun livre ses émotions et nous parlons longtemps, chaque expérience est enrichissante et donne de plus grandes dimensions à l’évènement.

    Tout est si contradictoire, la tristesse et la sérénité, le sang et le respect, la mort et le renouveau, tant que s'en est l’Équilibre.

    Nous finissons sur un banc, à quatre, après avoir raconté notre aventure, à accepter sans aucun mot la pluie laver et nourrir la Terre. Nous regardons longtemps très loin devant et très profond à l'intérieur. Des éclairs discrets viennent, comme un bouquet final, clotûrer la journée.

    Avant de se séparer, j'ai prit Tekoomse dans mes bras, et je l'ai remercié du fond du cœur.

    Et nous voila repartit vivre, émerveillés par les lucioles.

    Au Destin


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